Pour l’activité E du
cours Inf 6107 dans le cadre de ma maîtrise en technologie de l’information, je
devais rédiger un essai sur les changements que le web social pourrait apporter
à un milieu dans lequel j’évolue ou qui me touche et m’intéresse. Pour ce
dernier travail, j’ai choisi comme thème mon domaine de travail, soit les
forces canadiennes. Puisque ce domaine est très vaste, je vais surtout
focaliser mes propos sur l’Armée et mettre volontairement de côté la Marine et
les Forces Aériennes (les forces canadiennes sont divisées en trois éléments;
l’armée, la Marine et les Forces Aériennes). Je vais particulièrement étayer
mes propos sur le domaine de l’instruction et de la formation militaire. Je
vais donc discuter des changements que le web social pourrait apporter à ce
milieu, dans trois perspectives de temps; soit un an, cinq ans et vingt ans. En
tant que militaire au grade de major, j’évolue dans le domaine de l’instruction
depuis deux ans (j’ai également été instructeur de 2003 à 2006), J’ai commandé
une compagnie d’instruction pendant une année et je suis présentement chef des
normes d’enseignement pour les unités de la province de Québec. Fort de cette
expérience, je vais vous présenter mes vues sur l’avenir du web social dans ce
milieu.
Avant même de parler
de web social, je dois dire que bien que l’informatique soit présente dans
toutes les sphères de travail reliées au ministère de la Défense nationale,
nous ne sommes pas à la page, pour ne pas dire que nous sommes des dinosaures,
et cela dans bien des domaines. La sécurité des l’information étant l’élément
maîtresse des décisions du perfectionnement de l’équipement et de la diversité
des outils, bien des gadgets ou technologies nous sont interdits. Il faut
d’abord préciser que les forces canadiennes ont plusieurs réseaux, dont le
réseau DWAN (qui est le réseau de travail de tous les jours des membres du
ministère) et d’autres réseaux très sécurisés qui ont des catégories de
protection de niveau SECRET ou supérieur (cet essai ne traite pas de ces
réseaux). Le réseau DWAN est connecté à Internet, mais le passage se fait à
travers un pare-feu sévère, mais je dois dire, qui est devenu plus permissif au
cours des dernières années.
À titre d’exemple, à
ce jour et à ma connaissance, il n’est pas possible de connecter le réseau DWAN
à un réseau sans fil. La raison évoquée par les autorités étant les problèmes
de sécurité liés aux réseaux sans fil, ce qui est en partie vrai, mais aussi
discutable. Nous avons par contre accès à Internet et à certains réseaux
sociaux, dont Facebook. Ce qui est un
changement, pour ne pas dire une révolution, par rapport à il y a quelques
années. Également, pour ceux qui ont un téléphone intelligent fourni par le
ministère (Blackberry), la majorité
des applications sont déconnectées, comme l’Internet, la caméra et le Bluetooth. Il faut dire que certaines
interdictions ne sont pas nécessairement liées à la sécurité, mais parfois lié
au budget attribué à ces articles (connexion internet = $) ou pour empêcher des
abus potentiels. Récemment, l’accès aux messages textes a été autorisé,
démontrant ainsi une ouverture aux nouvelles technologies. C’est d’ailleurs
cette ouverture qui me permet de pouvoir discuter de l’avenir des réseaux
sociaux dans les forces canadiennes.
Court terme, d’ici un an
La tendance des
dernières années est la création de réseaux sociaux à l’extérieur du réseau
informatique du gouvernement et des murs de nos installations (il faut préciser
que ce n’est pas tous les militaires qui ont accès au DWAN). Beaucoup
d’organisations ont créé des pages Facebook pour rassembler leurs membres à
l’extérieur de l’organisation. Cette tendance va en augmentant, car de plus en
plus de groupes ou d’organisations militaires parlent de créer leur page
Facebook. Sur ces pages,
nous pouvons entre autres retrouver des photos d’entraînement, d’activités
sportives et d’exercice en campagne. Bien entendu, il s’agit d’information non classifiée
et disponible au public. Certaines organisations s’en servent pour donner de
l’information sur des activités à venir ou pour donner un compte-rendu d’une
activité passée (les résultats d’une activité sportive par exemple). S’ajoute à
ce contenu les commentaires des utilisateurs sur ces sujets ou pour discuter de
tout et de rien. C’est donc un lieu de rassemblement virtuel pour les membres
de la communauté militaire (et pour toute personne qui s’y intéresse).
C’est donc cette
tendance que je crois qui sera à la une dans la prochaine année. Outre le
processus d’acceptation de la chaîne de commandement afin de garder un contrôle
sur le contenu de ces pages qui demande un certain temps, nous allons vivre une
augmentation de ces pages autour desquelles se rassemblent de plus en plus la
communauté militaire. Il faut savoir que dans le passé, il y a eu des incidents
où des militaires n’ont pas utilisé adéquatement le réseau Facebook. À titre
d’exemples, de l’information sensible
a été transmise sur des pages personnelles Facebook lors d’opérations.
Également, certaines personnes, s’affichant ouvertement comme des militaires,
ont proféré des menaces).
Il y a donc une certaine réticence des instances militaires à ouvrir la porte à
ce site de réseau social ou à tout autre site du genre. Par contre, ils ont
vite compris qu’il ne pourrait pas l’interdire complètement, car ils ont peu de
contrôle sur ce que les militaires font dans leur temps libre. Alors, mieux
vaut l’autoriser et le contrôler que de tenter de l’interdire.
Lorsqu’utilisées
adéquatement, ces pages de groupe et les pages personnelles offrent une source
de transmission d’information additionnelle à leurs membres, elles donnent
encore plus de rayonnement à l’organisation et permettent aux gens de se
retrouver dans un endroit, moins formel, pour discuter de leurs passions ou de
tout et de rien. Les jeunes militaires font partie de la génération des « natifs »,
ils sont nés avec la présence d’internet, ou du moins, ils étaient très jeunes
lors de son avènement. Ils sont branchés, ils sont à la page, il est donc facile
pour les autorités militaires de les rejoindre sur leur propre terrain de jeu.
Ainsi, l’armée se modernise et rejoint sa jeune communauté. Je suis certain que
dans les prochaines années nous verrons la création de nombres de ces pages.
Perspective à moyen terme, dans cinq ans
Outre la prolifération
des pages Facebook et des sites web (je
n’ai pas parlé des sites web dans la section précédente, mais de plus en plus
d’organisations créent leur site web également. Je parle ici de site web
purement pour le web, et non pour le réseau du ministère), le milieu de
l’instruction sera caractérisé par la modernisation des outils d’instructions
et d’évaluation. Entre autres, le bureau du Directeur de l’instruction de
l’Armée vient de créer un site
web qui rassemble un nombre impressionnant de ressources d’instructions
(aide-mémoire, vidéos, documents, etc.) Ce site est toujours à l’état embryonnaire,
mais laisse présager des perspectives intéressantes pour le domaine de
l’instruction. Ce site est un rassemblement de connaissances, il ne manque
qu’une application sociale pour que ce site devienne un rassemblement de
références et un site de discussion. Également, le Centre d’instruction du
Secteur du Québec de la force terrestre (CI SQFT) a créé un site web, appelé le
portail de l’instruction individuelle, qui rassemble encore une fois l’ensemble
de la documentation et des références pour les cours. Ce site n’est pas encore
accessible sur Internet, seulement sur DWAN, mais le travail pour la transition
est en cours.
Comme mentionnés au
paragraphe précédent, tous ces projets ont très peu d’impact sur le web social,
du moins dans le format actuel. Ils sont des sites de références, mais ne
permettent par d’interactions proprement dites. Je crois par contre que ces
outils vont être éventuellement améliorés et permettent justement la création
de réseaux sociaux. Je vois très bien dans quelques années l’ajout de forum de
discussion pour justement aider au partage de connaissances entre instructeurs.
La communauté des instructeurs va se rejoindre à la grandeur du Canada et
devenir virtuelle. Il n’est pas exclu de penser qu’un moyen de communication
plus directe soit ajouté (mur comme sur Facebook, une page comme Twitter, etc.),
un tchat en direct finalement.
Au Québec et dans certains
autres pays, le milieu scolaire commence à étudier la possibilité d’implémenter
les technologies web dans les cours. Certaines écoles
exigent que chaque étudiant, ou certains groupes dans une école aient un iPad,
cela afin de l’utiliser pour la transmission d’information, de lecture et de
devoirs entre les élèves et les professeurs. Ces projets ne se font pas
toujours sans réticences,
outre l’aspect pédagogique qui est encore discuté, le coût est aussi un facteur
important, mais je crois que c’est seulement une question de temps pour que
cela se généralise. Pour le moment, ces projets se retrouvent davantage dans
des écoles privées. Il s’agit ici de briser certaines barrières et rejoindre la
jeunesse étudiante sur leur terrain. Pourquoi ne pas s’adapter à eux et aller
chercher leur intérêt en les instruisant dans leur zone de confort, avec des
outils à la page?
Le domaine de
l’instruction militaire pense aussi à
implémenter l’iPad comme outil (iPad ou une autre tabette). En particulier pour
les évaluations des stagiaires. Mettons-nous en contexte; lors d’évaluation
tactique sur le terrain, l’instructeur va suivre le groupe militaire en
campagne avec une feuille d’évaluation pour évaluer le ou les stagiaires qui commandent
le groupe. Suite à cette évaluation en direct, le stagiaire sera débreffé à
l’aide du formulaire et ce document sera inséré dans son dossier de cours. Ce
que le CI SQFT aimerait créer, et je crois qu’ils vont y parvenir d’ici
quelques années, ce serait de créer des applications pour les iPhone et iPad
pour remplacer les formulaires d’évaluation en papier. Ainsi, l’instructeur
aurait un de ces appareils lors de l’évaluation en campagne. Une fois
l’évaluation terminée, grâce à un réseau sans fil (isolé de DWAN ou connecté si
les réglementations changent d’ici ce temps), l’instructeur ferait imprimer le
document, ou mieux encore, le document électronique serait alors conserver dans
le dossier virtuel du stagiaire. La signature du document se ferait également
de façon électronique (tout comme lorsque vous recevez un colis de UPS). Avec
ces outils d’évaluation et un réseau sans fil, cela permettra également une
meilleure communication entre les instructeurs sur le terrain. Un réseau lien
de communication directe tel que Twitter pourrait être implanté pour permettre
cette communication.
Depuis le début des
années 2000, le domaine de l’instruction militaire a été caractérisé par la
création de formations en ligne, à distance. Il faut savoir qu’il existe trois
types d’instruction au niveau de l’Armée; les cours à distances, les cours en
classe et les cours en campagne. J’ai personnellement suivi un cours de
carrière en 2006, dont la première partie se faisait à distance. Dans le
confort de ma demeure, je devais me connecter à un site d’où je prenais mes
leçons et d’où je devais partager certains travaux à travers un forum et des appels-conférences
avec un petit groupe. Ce groupe s’est ensuite retrouvé à Kingston en Ontario
pour la deuxième portion du cours qui se faisait sur place, en classe. Depuis
ce temps, les cours en ligne n’ont cessé de prendre de la place dans le domaine
de l’instruction. Je crois par ailleurs que cela va continuer d’augmenter, car
outre l’aspect des technologiques qui améliorent la qualité de l’instruction,
l’aspect financier de déplacer les gens pour un cours ainsi que la qualité de
vie de ces derniers sont des facteurs qui me laissent penser que ce type
d’instruction va s’étendre encore plus dans les prochaines années.
Le futur, dans vingt ans
Il est difficile
d’extrapoler et de prédire ce que sera l’informatique et les technologies dans
un horizon aussi loin que vingt ans, car quand on y pense, il y a vingt ans, le
World Wide Web débutait à peine! Je
crois que le développement sera exponentiel et que bien des technologies que
nous côtoyons aujourd’hui n’existeront plus. Est-ce que nous imprimerons encore
autant de documents ou pratiquement tout sera virtuel? Est-ce que nous
utiliserons encore des courriels ou bien la messagerie sera directe, comme les
messages texte, mais en mieux? Je crois en fait que la prolifération de la numérisation
de l’instruction, de la création d’outils web et de propagation de
l’information via ces médiums et à travers des réseaux sociaux va caractériser
l’avenir de l’instruction dans les forces canadiennes.
Par contre, le frein à
cette technologie et ce développement sera la sécurité, bien en avant du
l’aspect financier et des réticences conservatrices de certaines instances. Il est
également difficile de prédire si les nouvelles technologies auront le dessus
sur le piratage et les risques de cyber terrorisme. Je crois malheureusement
que le combat sera incessant et que les risques vont demeurer omniprésents. Si
par contre un coussin de sécurité parvient à être établi, alors cela va ouvrir
la porte au développement des réseaux sociaux et de la
« virtualisation » de l’instruction.
Je vois très bien dans
le futur chaque stagiaire avoir un outil de travail, comme une tablette électronique
ou un téléphone intelligent, et que toute l’instruction en classe et à distance
se fera à partir de ces instruments et d’un réseau web ouvert. Toute la
matière, toutes les références seront disponibles en ligne. Des vidéos
d’instruction et des aide-mémoires seront accessibles pour les instructeurs et
les stagiaires. À ce stade, les instructeurs vont devenir davantage des
coordonnateurs et des conseillers dans ces phases d’instruction que des
professeurs proprement dits. Je crois par ailleurs qu’à ces outils se
grefferont des moyens pour générer le web social. À la base, tous les membres
de cette communauté (instructeurs, stagiaires, spécialistes, conseillers, etc.)
seront reliés et des applications et des logiciels permettront de créer ces
réseaux sociaux. Que ce soit, en prenant en exemple des exemples de notre
quotidien, des pages Facebook, des pages Twitter, des wikis, des forums, des
outils de partage de documents (texte, vidéo, audio), une multitude d’outil
permettront de générer le web social.

Si ce réseau virtuel
holographique existait, on pourrait remplacer des cours normalement donnés en
classe ou des réunions par ce genre de rassemblement virtuel. Il serait alors
aisé d’avoir un cours en direct avec tous les stagiaires et les instructeurs,
comme si nous étions, et cela, tout en restant à notre lieu de travail, ou à la
maison. Je pense qu’en voyant la révolution virtuelle dans laquelle nous
sommes, il est possible que nous y soyons rendus dans vingt ans.
En résumé, les forces
canadiennes sont après s’adapter à la réalité virtuelle et au web social,
particulièrement dans le domaine de l’instruction et de la formation, mais dans
biens d’autres domaines également. Les forces canadiennes sont une grosse
machine qui est difficile à faire changer, basée sur une culture conservatrice
et de sécurité. Les tendances à l’ouverture sur le web sont lentes, mais
progressent sûrement. Le web social, dans ce milieu, va suivre la progression
technologique. Présentement dans un stade d’utilisation des outils du web
social qui sont externes aux forces canadiennes, qui sont du domaine WWW, je
vois très bien l’implémentation graduelle de sites et de réseaux qui
permettront cette socialisation à même les systèmes de la Défense nationale.
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